Antarctic Film Festival

Au même titre que les festivités de la MidWinter, à l'occasion de laquelle la plupart des bases antarctiques et subantarctiques s'échangent des vœux au moment du solstice d'hiver austral, le festival du film antarctique, AFF dans le jargon, est un événement qui rassemble les différentes bases scientifiques du continent.

Les hivernants sont mis à contribution pour réaliser des courts-métrages de cinq minutes, dans deux catégories : Open et 48 heures.
La première est une catégorie libre, tandis que la seconde doit inclure des éléments imposés par l'organisateur, en la personne cette année d'un hivernant de la base néo-zélandaise Scott. Au total, 20 films étaient en compétition dans la catégorie 48h, et 13 dans la catégorie Open.


Dumont d'Urville a participé, dans les deux catégories. L'impulsion a été donnée par Guillaume et Mervyn, ambianceurs de la Team Géophy et brillants réalisateurs et animateurs de courtes vidéos depuis le début de l'hivernage, notamment autour de la MidWinter. Le scénario avait été ébauché depuis fin mai, il a été défini précisément courant juillet, à mesure que l'événement approchait.

J'ai été sollicité pour tenir le rôle principal de cet Open, intitulé Into the White, et dans lequel une grande majorité des hivernants apparaît.
C'est donc l'histoire d'un hivernant, qui se réveille, s'habille et se prépare pour sortir, mais dehors, c'est le blizzard, et la porte de sortie est bloquée par une énorme congère. Comme il n'y a pas d'autre solution que de rester à l'intérieur, il se voit obligé de tuer le temps en regardant un écran de télévision, et zappe, tombant sur des extraits d'émissions ou films cultes, revisités à la sauce DDU !
Première séquence, Hell's Kitchen (Cauchemar en cuisine), avec Bertrand qui pique une colère noire en arrivant dans une cuisine mal tenue, et Tony dans le rôle de l'apprenti cuisinier terrorisé par l'ire du chef. Vient ensuite la fameuse séquence de Star Wars où le Moff Tarkin, interprété par Patrice, donne l'ordre de détruire Alderande avec l'Etoile Noire, sous les yeux médusés de la princesse Leia en présence de Dark Vador, joué par Jérémy. Je joue le rôle de la princesse Leia, avec un accessoire bien particulier pour imiter les macarons de sa chevelure... Quant au puissant laser de l'étoile noire, il sera remplacé par celui du Lidar de DDU !

Quand la princesse Leia apprend que le grand Moff Tarkin va quand même détruire Alderande



Greg et Raph reprennent ensuite une scène de l'Exorciste, et Douglas, en Bear Grylls de l'Antarctique, tente de survivre au milieu d'une colonie de manchots gigantesques dans une imitation de Man vs. Wild.

La dernière scène a été la plus dure à réaliser, puisqu'il s'agit d'un remake de la scène cultissime du premier Alien de Ridley Scott ! C'est l'heure du repas à DDU, et Alain notre bien-aimé Dista, discute tranquillement avec Nicolas, le mépré, quand il semble soudain s'étouffer. Il tousse, commence à convulser. Stupeur dans l'assemblée, quelques uns tentent de l'aider en le maintenant allongé sur la table, mais voilà que son ventre est secoué par la bête, qui perfore son t-shirt en poussant des grondements extraterrestres...

La scène du dernier repas d'Alain




La vidéo se termine par Mervyn et Guillaume, les deux réalisateurs, arrivant avec allégresse dans la salle télévision en signalant une aurore. Je me lève alors, renversant par terre les miettes de pop corn ingérées machinalement devant la télé, et sors. La vidéo se termine par un timelapse de l'aurore avec le clair de lune, le 9 juillet.

Générique de fin




Notre "48h" a été réalisé le week-end des 3 et 4 août. Fort heureusement, le vent est resté modéré le samedi, entre deux grosses tempêtes catabatiques, ce qui a permis d'effectuer le tournage en extérieur. Le court-métrage est un plan-séquence de 5 minutes, où l'on suit Virgil et Nico courir du laboratoire de BioMar à l'hôpital en passant par la centrale, le séjour, la cuisine et le dortoir. 


Toutes les bases antarctiques et subantarctiques sont ensuite invitées à télécharger les vidéos des autres bases rassemblées sur un google drive, visionner et voter avant le 18 août !

Il y a au total 7 prix, deux dans la catégorie Open : meilleur film, meilleur montage, et 5 dans la catégorie 48h : meilleur film, meilleur montage, meilleure réalisation, meilleur costume et meilleure utilisation des 5 éléments imposés.
Cette année, il fallait inclure dans la vidéo des 48h les 5 éléments suivants : un scientifique, une balle de tennis, un coup de piolet, le bruit d'un vieux klaxon et la réplique "that's not a knife.. THAT's a knife !" du film australien Crocodile Dundee.

Des problèmes Internet nous ont malheureusement empêché de télécharger à temps les vidéos des autres bases dans la catégorie Open, on s'est contentés donc de regarder celles du 48h. La qualité était assez inégale, certains courts-métrages sont des pépites, dans d'autres on ne comprend pas grand chose à ce qui se passe, sans que ce soit entièrement lié à l'accent anglais parfois difficilement compréhensible ou l'absence de sous-titres.

J'ai beaucoup aimé la vidéo de Crozet, qui a d'ailleurs remporté le prix du meilleur costume et de la meilleure réalisation. Beaucoup de poésie et une très belle musique dans ce petit film, où un hivernant entre dans un sas et est propulsé dans une sorte de rêve, un music-hall dans une atmosphère du milieu du XXe siècle, où il s'éprend de la chanteuse du groupe qui joue sur la scène. Il s'ensuit une danse gracieuse entre les deux, avec un habile parallèle avec les albatros, qui pour se faire la cour, paradent en déployant leurs majestueuses ailes.

Dans un autre style, le film de Rothera était le plus drôle, et a gagné le prix du meilleur film, tandis que celui de la base Amundsen-Scott South Pole Station a gagné le prix du meilleur montage, et je l'ai beaucoup apprécié. Intitulé "The Wall the truth", il met en action un hivernant, membre de la "société de la terre plate" (flat earth believers en V.O), infiltré à la station scientifique du Pôle Sud, pour tenter de démontrer l'existence d'un immense mur de glace censé se trouver au bord de la Terre.
Non seulement il était d'une très grande qualité, mais aussi très drôle. S'infiltrant dans un couloir secret, notre personnage principal découvre des laboratoires secrets, dont les écriteaux à l'entrée renvoient à des complots conspirationnistes tous plus loufoques les uns que les autres : chemtrails, autopsies extraterrestres, illuminati, pyramides nazies de glace en Nouvelle Souabe... Au bout de ce couloir, la dernière pièce, la "salle des opérations du mur de glace", où il s'introduit et dérobe la fameuse carte du mur de glace que les grands de ce monde nous cache, au nez et à la barbe du scientifique présent. Ce dernier, en pleine conversation téléphonique et de dos, évoque avec un de ses supérieurs la nécessité de répandre dans le monde entier la théorie du réchauffement climatique d'origine anthropique... Évidemment !
Dernière scène, on le voit terminer l'ascension du mur de glace, mais au sommet se trouvent deux hommes, qui avaient découvert son manège, et décident de l'éliminer... d'un coup de piolet fatal!

Dans la catégorie Open, c'est Concordia qui a gagné le prix du meilleur film, en transposant la chorégraphie des Miami Dolphin Cheerleaders sur la chanson "Call me maybe" de Carly Rae Jepsen, qui avait fait le buzz il y a quelques années, dans l'univers de Concordia ! Un rendu vraiment sympa, mais pas vraiment d'originalité à mon goût, puisque ce genre de reprises avait déjà été faite, notamment par l'Armée américaine sur une base d'Afghanistan.

Dans la catégorie meilleure réalisation, c'est la base polonaise de Arctowski qui a remporté le prix, avec 11 votes sur 22 ! Cependant, il n'a pas encore été mis à disposition à DDU, et je ne l'ai donc pas vu.

Chou blanc pour DDU donc, on est resté aux places d'honneur, avec tout de même deux votes dans les catégories "meilleure réalisation" (troisième ex aequo derrière Crozet et Amundsen-Scott) et "meilleur montage" (deuxième, loin derrière Amundsen-Scott avec 9 votes !) dans le 48h, un vote pour la meilleure réalisation à l'Open, et 3 pour le meilleur film de l'Open, contre 10 pour Concordia.

Néanmoins, j'aurai le souvenir de bons moments de tournage et de discussions autour du scénario et de la mise en scène, fréquentes pendant les repas qui précédaient le week-end de l'AFF !

Impossible de les inclure dans article de blog, hélas, mais je vais garder précieusement mes vidéos préférées de l'AFF, pour éventuellement les montrer aux familles et amis au retour...

La semaine dernière a été bien froide, les températures évoluant entre -27 et -16°C, mais très bien ensoleillée, plus de 50 heures au total ! Le vent, très faible jusqu'à mercredi, est bien établi depuis jeudi, sans être violent, les rafales n'excèdent pas 100 km/h.

Profitant du temps radieux et peu venté mercredi matin, un footing était organisé de DDU au Cap Prud'homme, en longeant à distance raisonnable les falaises de glace de l'Astrolabe. Un total de 11km en 1h15, par -24°C ! Un super moment et un bon bol d'oxygène !

J'ai fini le visage complètement givré, à ce niveau de température le souffle de la respiration se condense sur la peau du visage et gèle rapidement, donnant un aspect d'abominable homme des neiges !

Après plus d'une heure de course sur la banquise par -24°C..

Et enfin, le résumé climatologique sous forme de tableau, la température moyenne continue de baisser lentement, le cumul d'insolation monte désormais de plus en plus vite, si le printemps est beau, on pourrait atteindre la barre des 2000h début décembre !

TM
TNN
TXX
FFM
FXY
FXI
INSOL
-10,1°C
-31,8°C le 05/06
6,4°C le 18/12
35,4 km/h
142,6 km/h le 31/07
200,8 km/h le 01/08
1189,7 h


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